Trouver de la nourriture dans un labyrinthe – une histoire d’hyphe.

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De la microbiologie pour ceux qui ont les crocs


Trouver de la nourriture dans un labyrinthe – une histoire d’hyphe.

Les champignons sont très bons sur les pizzas ou le risotto. Nous les trouvons en forêt durant l’automne ou au printemps quand l’humidité et les températures sont idéales. Mais ce que nous voyons du champignon est en fait le corps fructifère (fruiting body) et l’organisme lui-même est sous terre et peut être beaucoup plus grand.  Grand de combien? Il peut aller jusqu’à 3,8 km!

Ce que nous ne voyons pas sont des hyphes qui sont des filaments qui composent le mycélium. Les hyphes, qui peuvent être comparées aux racines des plantes, vont dans le sol à la recherche de nourriture, ce qui n’est pas une tâche facile. Et parce qu’elles cherchent dans le noir, il est difficile pour nous de comprendre comment elles trouvent leur chemin dans ce labyrinthe.

Dans une récente étude, Aleklett et ses collaborateurs ont cherché à savoir comment l’hyphe explore son environnement en utilisant un nouveau dispositif. En effet, il est très difficile de les étudier dans leur milieu naturel et les conditions en laboratoire ne reflètent pas toujours la réalité. Ici, les chercheurs ont conceptualisé une puce avec des des microstructures pour former des obstacles en zig-zag, carré, ou en forme de Z aléatoirement mis dans différents chemins montrés ci-contre. 

Leur objectif était de répondre à une simple question: Comment et dans quelles conditions spatiales (obstacles, virages etc…) l’hyphe peut elle explorer son environnement et a-t-elle une préférence? Nous pourrions imaginer que si un chemin est plus facile alors pourquoi ne pas prendre ce dernier, n’est-ce pas? 

La réponse n’était pas aussi simple. Dans l’étude, les auteurs ont regardé plusieurs espèces et il semble que chaque espèce a sa propre façon d’explorer son voisinage. En d’autres termes, chaque espèce a différentes stratégies pour trouver de la nourriture dans un labyrinthe complexe. 

Les espèces font partie du même ordre mais diffèrent dans leur habitat écologique: humus, bois mort ou juste après un feu (colonisateurs). Les chercheurs ont mesuré la vitesse à laquelle les différentes espèces se déplacaient à travers le parcours d’obstacles ainsi que la distance parcourue. De plus, ils ont regardé la flexibilité de l’hyphe dans les différents virages.


Adaptée de https://www.nature.com/articles/s41396-020-00886-7#rightslink

Les chercheurs ont aussi regardé le comportement des champignons dans un milieu ouvert et fermé. Dans les figures nous pouvons voir que le comportement est différent selon les espèces. Ils forment des motifs différents pour explorer la zone ( plus de figures dans l’article ici)

Les auteurs ont montré dans cette étude que le comportement de l’hyphe était fortement dépendant de l’espèce et ils montrent que les concepts utilisés pour décrire la croissance de l’hyphe ne suffisent pas à expliquer ces différences. Cependant, les résultats nous aideront à interpréter comment différentes espèces parviennent à vivre séparément ou en co-existence dans leur environnement, ce qui nous permettra de mieux les comprendre dans leur habitat naturel.   


Article: Aleklett, K., Ohlsson, P., Bengtsson, M. et al. Fungal foraging behaviour and hyphal space exploration in micro-structured Soil Chips. ISME J (2021).

Doi: 10.1038/s41396-020-00886-7


Traduit par Yohann Geraldes